SPEAKER’S LE MOIS ÉCONOMIQUE L’ANNÉE COMMENCE MAL POUR LES MILLIARDAIRES Et pour les autres aussi. Il n’y a plus de place pour les amateurs sur les marchés financiers. Désormais, c’est ENA (enfants non admis) | Jean Blavier Souvenir d’un voyage de presse, au lendemain d’une secousse boursière comme on en a connu beaucoup. Dans l’avion, un prof d’univ’ qui était de la compagnie s’étonne : « On dit que x milliards sont partis en fumée. Mais où sont-ils, ces milliards ? » Votre serviteur a évoqué François Villon, « Mais où sont les neiges d’antan ? », rien à faire, mon interlocuteur était bien plus intéressé par les jambes d’une consœur croisées très haut que par mon discours qui se voulait pédagogique. À l’époque, je ne savais pas (encore) qu’il ne faut jamais user du langage pédagogique avec un prof. Aujourd’hui, je me demande si ce discours a une quelconque utilité. Globalement, les marchés boursiers ont baissé de 6 à 7 % en janvier. Des gens comme Jeff Bezos ou Bill Gates ont perdu des milliards. Mais ils peuvent assumer, eux. Et donc, mes pensées vont aux victimes de la vénéneuse Tina (« there is no alternative »). Tous ces épargnants qui, faute de trouver un rendement convenable dans les placements traditionnels, se sont laissé convaincre qu’il fallait se ruer en bourse, en oubliant que, pour une part, c’est précisément parce qu’ils se ruent en bourse que les cours montent. La meilleure façon d’avoir raison, c’est de faire en sorte qu’on ait raison, non ? Il y a d’ailleurs sur le marché des placements une inégalité de traitement dont on ne parle que peu. M. et Mme Z, comme dans « zzzz... » (c’est-à-dire : je m’endors pendant que mon banquier cause), sont désespérés de voir que leur compte d’épargne ne rapporte que des clopinettes. Ils ont donc « été en bourse », comme on dit. Notamment parce que leur banquier le leur a suggéré, que dans les réunions de famille et les dîners en ville on leur a dit : « Quoi ? Toujours pas en bourse ? Tsss... » Inutile de vous dire que M. et Mme Z ne font plus « zzzz... » la nuit. Aujourd’hui, ça les ronge. Étape 1 : zut, ça baisse. Étape 2 : zut, ça baisse encore. Étape 3 : et si ça continue à baisser ? Etape x : on vend ! À perte, bien sûr. M. et Mme Y, eux (comme dans « génération Y », c’est-à-dire je suis à la page et j’ai compris comment ça marche), ont les moyens de s’offrir les services d’un conseiller financier ou d’un banquier privé qui leur a proposé des deals en private equity sur lesquels ils obtiennent 5, 6, voire 7 % de rendement. La bourse baisse ? « M’en fous, j’y suis pour dix ans au moins et de toute façon mes placements sont bien diversifiés. » D’ailleurs, « J’ai encore gagné un peu en janvier sur ces produits pourris que sont les obligations puisque, contre toute attente, les taux ont encore baissé. » Eh oui, les taux ont encore baissé en janvier parce que ceux qui ont eu peur en bourse se sont précipités sur les obligations, ce qui a fait monter les cours et baisser les rendements, donc les taux… Bref, il y avait d’un côté ceux qui, pris de panique, achetaient cher et vilain des obligations hors de prix (M. et Mme Z, par exemple), et de l’autre les détenteurs de ces obligations (M. et Mme Y par exemple), qui voyaient les cours monter, monter... et qui n’ont bien sûr pas vendu en bourse, eux. Au contraire, sur les conseils de leur banquier privé, ils ont probablement acheté à moindre prix ce que vendaient M. et Mme Z. La manière dont M. et Mme Toutlemonde se font c... sur les marchés financiers fait songer à la queue au supermarché : « La file d’à côté va plus vite, je change ». Une minute plus tard : « C’est la file où j’étais qui avance plus vite maintenant. Je retourne. » Et ainsi de suite. Il faut que le message passe haut, clair et fort : la bourse et les marchés financiers en général, c’est réservé aux professionnels. Pas ou plus aux amateurs, à moins d’être un adapte des sports dangereux qui, comme on sait, ne sont quasi jamais couverts par les assureurs. La bourse, c’est ENA (enfants non admis). ● Créez votre entreprise en 45 min. chrono ! Rendez-vous personnalisé et gratuit à notre guichet d’entreprise au J Numéro d’entreprise J TVA J Caisse d’assurances sociale CORNER 02 643 78 09 J Mutuelle J Assurances www.beci.be/guichet BECI - Brussels Business - novembre 2015 5 Pagina 6

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