© Thinkstock Majorations de cotisations ONSS : les leçons de l’arrêt Rigobert À l’heure où des pouvoirs publics entendent stimuler des investissements générateurs d’emploi, l’ONSS continue à jouer sa partition : faire rentrer les cotisations dans les caisses. C’est son rôle. Encore faut-il le faire dans les règles. D’après l’exemple qui nous est rapporté, ce n’est pas le cas. Récemment, le pourvoi en cassation de l’ONSS en cette affaire a été rejeté. Bref examen. Vincent Delannoy D ans l’affaire qui oppose la SA Rigobert et l’ONSS, la Cour du travail de Bruxelles a rendu un arrêt en date du 17 juillet 2014, en appel d’un premier jugement. Pour s’en limiter aux enjeux principaux, le différend porte sur des exonérations de majorations et intérêts à la suite de retards de paiement. De quoi s’agit-il ? La SA Rigobert exerce une activité de menuiserie à Bruxelles. À partir de l’année 2007, elle a dû effectuer un investissement immobilier de l’ordre de 4 millions pour s’installer dans un nouvel environnement, à la suite de plaintes de voisinage de son ancien siège d’exploitation. Confrontée à cette situation, l’entreprise a connu des difficultés pour payer en temps utile toutes ses cotisations de sécurité sociale. En juin 2011, la SA contracte un emprunt et règle ses arriérés de cotisations, tant en principal qu’en majorations et intérêts. Le 24 juin, elle demande à l’Office national de sécurité sociale l’exonération complète des majorations et intérêts. Cette demande est basée sur le fait qu’elle est titulaire de créances à l’égard de différents services publics, notamment l’administration de la TVA et envers la Région bruxelloise pour des subsides d’investissements (possibilité d’exonération prévue par l’article 55 § 3 de l’arrêté royal du 28 novembre 1969 concernant la sécurité sociale des travailleurs). La décision de l’ONSS concernant la demande d’exonération n’a été prise qu’en date du 26 septembre 2011, l’Office ayant sollicité en septembre un document à faire signer par la Région bruxelloise, reprenant les subsides auxquels l’entreprise Rigobert avait droit. En conséquence, dans sa décision du 26 septembre, l’Office estime qu’il ne pouvait pas tenir compte de la créance à l’égard de la Région bruxelloise, étant donné qu’il n’avait reçu l’attestation qu’en date du 13 septembre 2011. Sur ce point, la Cour du travail donne tort à l’ONSS, la preuve de l’existence d’une créance certaine et exigible ne devant pas faire l’objet de la production d’un document déterminé, établi ou prescrit par l’ONSS. « Il suffit que la partie, qui demande l’exonération, joigne à sa demande des documents justificatifs d’une créance certaine et exigible. » Il s’ensuit que « l’Office national de sécurité sociale aurait donc dû examiner la demande à la date à laquelle elle avait été introduite. Surabondamment l’Office national de sécurité sociale, s’il estimait que la demande ne pouvait être accueillie que moyennant la production de certains documents complémentaires, a commis en l’espèce une faute en tardant à réclamer ces documents complémentaires. » Des pratiques interpellantes De manière plus générale, l’examen de l’affaire Rigobert/ ONSS met en évidence certaines pratiques interpellantes. Il est ainsi établi que l’ONSS a lancé une citation concernant le paiement d’une somme qui avait été en fait soldée, l’avocat de la société Rigobert devant constater qu’« il est étonnant de voir un organisme tel l’ONSS ne pas être capable de tenir ses comptes à jour ». Ainsi, il ressort que le service de perception ordinaire n'a ici pas été informé de la situation par le service qui gère les retenues. Dans ses relevés, nous pouvons aussi constater que l’ONSS présente des tableaux dont certains pourcentages et chiffres ont été tippexés et modifiés manuellement. Une autre ineptie de taille : l'ONSS a mis 563 jours pour enregistrer un paiement. Plus étonnant encore : il traite son propre retard d'imputation comme un retard de paiement ! Enfin, le dernier chapitre de cette affaire s’est soldé récemment. L’ONSS, mécontent de l’arrêt de la Cour du travail, s’était pourvu en cassation. Mal lui en prit. Ce pourvoi a été rejeté et l’ONSS a été condamné à régler les frais de procédure. ● BECI - Bruxelles métropole - février 2016 37 Pagina 38
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